Dans les régions arctiques et subarctiques, vastes territoires très faiblement peuplés, l’élevage de rennes est au centre des activités de subsistance, une activité traditionnelle ancestrale ainsi qu’un mode de vie. Le changement climatique particulièrement rapide dans ces environnements extrêmes fragilise les liens privilégiés entre les populations autochtones et leur territoire. C’est un véritable défi pour ces populations d’adapter leur mode de vie traditionnel au changement climatique. Nombres d’études récentes font état du déclin des populations de rennes (Festa-Bianchet et al., 2011) même si, à contrario, il est noté une certaine résilience chez ces ruminants (Uboni et al., 2016). En effet de nombreuses sous-espèces et leur écotype largement dispersés dans les régions circumpolaires, soulignent cette remarquable capacité d’adaptation. Les effets du changement climatique sur les populations de rennes sont variés, complexes et difficiles à globaliser (Mallory &  Boyce, 2017); étudier ces manifestations à une échelle plus locale et/ou régionale en lien avec les activités anthropiques devra également être privilégié pour adapter la gestion des espaces à la pérennité des activités socioéconomiques en lien avec l’élevage des rennes. 

Les nombreux processus induits par le réchauffement climatique et les activités anthropiques, peuvent avoir des conséquences positives ou négatives sur la santé des rennes via leur alimentation. Par exemple la biomasse végétale disponible augmente en lien avec la durée et la température de la période estivale mais la présence accrue d’insectes parasites est connue pour ses effets délétères notables (Murray et al., 2006). Le lichen, de croissance très lente et dont le rôle alimentaire est primordial pour les rennes en hiver, est menacé par l’augmentation de la fréquence des feux en hiver, par des épisodes croissants de ‘pluie sur neige’ et par le déplacement vers le nord de la limite taïga-toundra et donc l’invasion des plantes ligneuses en lieu et place du lichen. Entre autres paramètres étudiés et contrôlés, la santé des rennes a aussi été suivie via les concentrations en éléments traces (ET) accumulées dans différents organes et dans leur alimentation (Franck et al., 1994; Frank, 2004; Flueck et al., 2012).  Ces ET minéraux sont soit toxiques (Cd, Pb..) soit des oligo-éléments (Cu, Se..). Leurs cycles biogéochimiques présentent une grande complexité du fait de leurs sources, lithiques ou anthropiques, et de leur recyclage par la végétation. De plus, lechangement climatique induit un dégel progressif et plus intense du pergélisol activant les cycles biogéochimiques notamment des ET : Le réchauffement de la région arctique aura un impact sur leur bio-disponibilité pour les espèces végétales et animales, et leur transfert dans les réseaux trophiques.

Dans ce contexte de changements complexes, l’élevage du renne pourrait être profondément bouleversé. TRAC3S propose d’accompagner les éleveurs avec une démarche participative à travers l’étude d’un phénomène peu étudié et difficile à appréhender afin de leur fournir les informations nécessaires à d’éventuel changements de leurs pratiques.